Revue Chemins d'étoiles n° 12
Novembre 1997 - ISSN 1279-368X - 20 € TTC
Editorial
Dans son monastère, Brendan avait trouvé un trésor : un livre qui dévoilait les mystères de l’Au-delà. Bouleversé par cette découverte, le jeune moine brûla l’ouvrage et s’efforça d’en oublier le contenu. Mais il ne pouvait chasser de son esprit les descriptions qui avaient enchanté son imagination. C’est alors qu’un ange lui apparut, et lui ordonna de se mettre à la recherche du pays merveilleux qui, par sa lecture imprudente, lui avait été promis… Avec quelques compagnons, Brendan entreprend la construction d’un navire, rassemble quarante jours de vivres et se lance sur la mer, s’abandonnant au gré du vent et des flots. En quête d’une terre de lumière.
Alors s’enchaînent les aventures. Naviguant d’île en île, les moines surmontent les épreuves et, au bout de sept années, arrivent en vue du Paradis. Ils n’y séjourneront guère : bien vite, ils devront repartir dans l’obscurité, en traversant l’épaisse brume qui enveloppe l’île mystérieuse. À leur retour parmi les leurs, le monde a peu changé : le temps ne s’écoule pas en terre d’immortalité.
Une porte entre deux mondes, dissimulée dans le brouillard des songes : l’île refuge, ancrage secourable, résistant aux assauts de l’océan. Roc immuable que le navigateur audacieux est le seul à pouvoir approcher mais qu’il ne conquiert pas sans risque. Royaume bienheureux tant espéré, terre de paix si désirée. Île verte ou blanche des mythologies, île de verre des légendes, Avallon, Hespérides, terre des fées, jardins enchantés. Séjour des recommencements où tout n’est qu’harmonie.
Il y a, quelque part vers l’ouest, une île qui nous attend. Les Irlandais la nomment Tir na n’Og et les Bretons Bro ar Re Yaouank, mais elle est pour tous terre de salut et d’éternelle jeunesse. Lieu périlleux pour les mortels, elle représente le port ultime pour les âmes élues. Certaines nuits, lorsque la mer est étale, on voit la barque des morts accoster. Elle vient chercher d’invisibles passagers qui se pressent sur la grève. Le passeur les appelle par leur nom, les invitant à faire leurs adieux au monde des vivants et à s’acquitter de leur obole pour la grande traversée. Lorsqu’il est chargé, le navire s’éloigne silencieusement, sous la voûte étoilée, vers le Couchant. Vers une île qui peu à peu se dessine, là-bas, dans le lointain.
Gaële de La Brosse
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